La lettre d’intention peut comporter des obligations de nature et d’intensité variables, s’étendant du simple engagement moral à un engagement contractuel engendrant une obligation de faire ou de ne pas faire, de moyens ou de résultat.
Les lettres d’intention sont dépourvues de portée juridique lorsqu’elles n’expriment qu’un engagement moral.
Si l’intention exprimée est de se substituer au débiteur, elles ne sont autre chose que de véritables cautionnements.
Leur spécificité en tant que variété particulière de garanties n’est révélée que lorsqu’elles formulent des obligations de faire
Ces obligations sont tantôt de moyens tantôt de résultat ; cette distinction, qui a suscité des hésitations, spécialement à propos de l’engagement de « faire le nécessaire » détermine la charge de la preuve du manquement à l’obligation.
LA LETTRE D’INTENTION CONSTITUANT UN SIMPLE ENGAGEMENT MORAL
Les lettres d’intention qui ne comportent qu’un engagement moral ou une obligation naturelle, contiennent de simples déclarations n’entraînant pas d’obligation juridique à la charge de la société mère. Elles sont donc particulièrement difficiles à faire sanctionner.
Ainsi une lettre d’intention par laquelle un investisseur en capital-risque indique dans quelle condition il envisage de rentrer au capital d’une société permet de donner un cadre sécurisé aux négociations précontractuelles ; elle ne vaut pas en principe engagement définitif (CA Versailles 30 juin 2011 n° 10/06302, 12e ch. Sect. 2, SAS BNP Paribas Private Equity c/ SA Groupe Euroservices ACTA, D. 2011 p. 2848 note B. Dondero).
Dans le cadre de négociations engagées en vue de la reprise du capital d’une société, le candidat repreneur avait adressé une lettre d’intention d’acquérir aux associés qui l’avaient signée. Le prix de cession était fixé dans la lettre sur la base d’un bilan comptable établi contradictoirement à une date ultérieure. Au jour de la lettre, le passif était donc inconnu. Il a été jugé que la vente ne pouvait être conclue puisque le prix n’était ni déterminé ni déterminable, sa fixation impliquant un nouvel accord de volonté des parties (Cass. com. 6 novembre 2012 n° 11-26.582 (n° 1095 F-D), Sté du Roi Albert c/ Sté Baudry Dutour : BRDA 24/12 inf. 4).
Les tribunaux dénient toute valeur juridique contraignante aux lettres d’intention ne constituant que de simples engagements moraux, refusant ainsi de retenir une quelconque obligation de payer à l’encontre de l’auteur de la lettre en cas d’insolvabilité de la filiale débitrice.
LA LETTRE D’INTENTION CONSIDÉRÉE COMME UNE OBLIGATION DE MOYENS
L’auteur de la lettre d’intention est considéré comme débiteur d’une obligation de moyens à chaque fois qu’il n’a promis qu’une diligence, par exemple lorsqu’il s’est engagé à faire tout son possible pour qu’une action se réalise.
Il s’agit en fait de toute obligation pour laquelle le débiteur n’a pas pris d’engagement précis et auquel un résultat n’est donc pas imposé. L’obligation de moyens se résume donc à chercher à atteindre un résultat en y appliquant tous ses soins. Il faut prouver l’inexécution de l’engagement. Il faut rapporter la preuve délicate d’un fait négatif, d’une abstention.
Quels sont les critères d’identification et quelques exemples tirés de la JP :
Les solutions retenues par les tribunaux sont essentiellement motivées par les circonstances de chaque espèce, antérieures, postérieures, auxiliaires ou externes qui permettent de mesurer l’étendue de l’engagement et le caractère sérieux des efforts entrepris.
Portée et conséquences de la qualification d’obligation de moyens
L’inexécution d’une lettre d’intention ou de confort constitutive d’une obligation de moyens et le non-respect de l’obligation de diligence qui en résulte par la société mère, doit, en cas de défaillance du débiteur garanti, être prouvée par le destinataire de la lettre d’intention qui devra donc démontrer, d’une part, une faute du souscripteur et, d’autre part, que cette faute est en relation directe avec le préjudice subi. A défaut d’établir cette preuve, l’action en responsabilité du créancier à l’encontre du souscripteur de la lettre d’intention doit être rejetée.
Si le créancier est en mesure de démontrer que le souscripteur de la lettre d’intention n’a pas respecté son obligation de diligence, celui-ci peut être condamné à verser au créancier des dommages-intérêts, d’un montant égal, le cas échéant, à la créance de celui-ci.
La Cour de cassation a ainsi retenu la responsabilité du souscripteur d’une lettre d’intention pour n’avoir pas rempli son « obligation de mettre en oeuvre les moyens en son pouvoir pour satisfaire l’engagement qu’il avait souscrit », et notamment pour ne pas avoir averti le créancier de la réduction significative de sa participation dans le capital de la filiale alors qu’il s’y était engagée dans la lettre d’intention, et pour ne pas avoir évité le désengagement brutal d’une société dont il était responsable. La sanction du non-respect de cette obligation de « tout mettre en oeuvre » fut la condamnation de la société mère à verser à la banque créancière des dommages-intérêts d’un montant équivalent à celui de la dette de la filiale (Cass. com. 19 mars 1991 n° 509 P, Sté Cie générale de Travaux et d’Installations Electriques (CTIE) c/ Banque Atlantique de Côte-d’Ivoire).
LA LETTRE D’INTENTION CONSIDÉRÉE COMME UNE OBLIGATION DE RÉSULTAT
Cette lettre emporte une obligation de faire.
Quelques expressions constituant une obligation de résultat :
-prendre toutes les dispositions pour que le débiteur puisse remplir ses engagements
-assurer la bonne exécution des engagements
-faire en sorte que
-faire le nécessaire.